5. Les délais de procédure applicables aux mineurs poursuivis du chef d’un fait qualifié infraction en Belgique francophone
Les délais de procédure sont une compétence fédérale. L'article 62 de la loi du 8 avril 1965 relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié infraction et à la réparation du dommage causé par ce fait (ci-après, loi du 8 avril 1965) dispose que la procédure correctionnelle prévue par le Code d'instruction criminelle est appliquée devant les juridictions de la jeunesse sauf si elle prévoit des dérogations à celles-ci.
Dans les quatre premiers points de la présente fiche, nous examinerons une série de délais qui doivent être respectés aux différents stades de la procédure (arrestation (1), information (2), phase préparatoire (3) et au fond (4)). Dans les trois points suivants, nous discuterons des délais qui s’appliquent lorsque le jeune fait l’objet d’une mesure. Nous aborderons, plus précisément, les délais qui s’appliquent en cas de révision de mesure (5), de mesures provisoires (6) et de mesures d’investigation (7).
1. Au stade de l'arrestation
L'article 48bis de la loi du 8 avril 1965 dispose que lorsqu'un mineur est privé de sa liberté suite à son arrestation ou a été mis en liberté contre la promesse de comparaître ou la signature d'un engagement, le fonctionnaire de police responsable de sa privation de liberté doit, dans les meilleurs délais, donner ou faire donner au père et mère du mineur, à son tuteur ou aux personnes qui en ont la garde en droit ou en fait, une information orale ou écrite de l'arrestation, de ses motifs et du lieu dans lequel le mineur est retenu. Le non-respect de cette disposition n'est pas sanctionné.
L'article 1er, al. 1er, 1° de la loi 20 juillet 1990 relatif à la détention préventive dispose que l'arrestation en cas de flagrant crime ou de flagrant délit est soumise aux règles suivantes : 1° la privation de liberté ne peut en aucun cas dépasser quarante-huit heures. Au 6°, il indique le point de départ du délai : l'heure précise de la privation de liberté effective, c'est-à-dire le moment où la personne ne dispose plus de la liberté d'aller et venir. Cette heure doit être mentionnée dans le procès-verbal d'arrestation. Le 3° précise que si un particulier retient une personne prise en flagrant crime ou en flagrant délit, elle doit dénoncer immédiatement les faits à un agent de la force publique. Dans ce cas, le délai de quarante-huit heures prend cours à partir du moment de cette dénonciation.
L'article 2 règle les cas d'arrestation hors le cas de flagrant crime ou de flagrant délit. Dans ce cas, également le délai d'arrestation ne peut pas dépasser 48 heures.
Dans les deux cas de figure, si, au terme du délai, la privation de liberté d'un mineur n'est pas confirmée par la décision du juge de la jeunesse de le placer en IPPJ à régime éducatif fermé ou remplacée par une autre mesure, il doit être remis en liberté. Dans le cas contraire, il est détenu arbitrairement, ce qui constitue une infraction pénale dans le chef de celui qui le détient.
Le mineur arrêté a le droit d'être assistée par un avocat dès sa première audition. L'article 2bis, § 2 de la loi 20 juillet 1990 précise qu'une fois que l'avocat a été contacté, la concertation confidentielle qu'il peut avoir avec son client avant le début de l'audition doit avoir lieu dans les deux heures. Après ce délai, si l'avocat n'est pas présent, il peut y avoir une concertation confidentielle par téléphone avec un avocat de permanence et, ensuite, l'audition peut débuter. Dans les cas de force majeure, elle peut débuter même sans cette concertation par téléphone.
2. Au stade de l'information
3. La durée de la phase préparatoire
La durée de la phase préparatoire varie selon que ce soit le Code de la prévention, de l’aide à la jeunesse et de la protection de la jeunesse (CPAJPJ) ou la loi du 8 avril 1965 qui s’applique à la situation. Pour savoir si c’est l’un ou l’autre texte qui s’applique, le lecteur devra se référer à l’article 44 de la loi du 8 avril 1965 qui règle la question de la compétence territoriale et du droit applicable :
1. Art. 44. § 1er. La compétence territoriale du tribunal de la jeunesse est déterminée par la résidence des personnes qui exercent l'autorité parentale ou, en cas d'exercice conjoint par des personnes séparées, par la résidence de celle chez qui le jeune réside habituellement.
2. Lorsque celles-ci n'ont pas de résidence en Belgique ou lorsque leur résidence est inconnue ou incertaine, le tribunal de la jeunesse compétent est celui du lieu où l'intéressé a commis le fait qualifié infraction, du lieu où il est trouvé ou du lieu où la personne ou l'établissement auquel il a été confié par les instances compétentes a sa résidence ou son siège.
3. Lorsque le tribunal de la jeunesse est saisi après que le jeune a atteint l'âge de dix-huit ans, le tribunal de la jeunesse compétent est celui du lieu de la résidence du jeune, ou, si celle-ci est inconnue ou incertaine, du lieu où le fait qualifié infraction a été commis.
a) En région unilingue de la Communauté française
L'article 101 du Code de la prévention, de l'aide à la jeunesse et de la protection de la jeunesse (CPAJPJ) indique que la durée de la phase préparatoire court du jour où le juge de la jeunesse est saisi par apostille du parquet jusqu'au jour du jugement au fond rendu après l'audience publique. Notons, que la phase préparatoire n’est pas une phase obligatoire. Le parquet peut de suite citer à l'audience publique. Toutefois, dans la pratique, cette option est très rare.
L'article 103 du même Code dispose que cette phase ne peut pas excéder neuf mois. La sanction du dépassement de ce délai est la cessation de plein droit des mesures provisoires qui ont été prises durant la phases préparatoire.
Toutefois, cette phase peut être exceptionnellement prolongée d'une durée de trois mois, renouvelable, si cette prolongation est nécessaire pour déterminer les faits qualifiés infractions ou pour connaître la personnalité du jeune et son milieu de vie. Durant cette prolongation qui doit faire l'objet d'une motivation spéciale, des mesures provisoires peuvent être prises ou maintenues si des circonstances graves et exceptionnelles se rattachant aux exigences de la sécurité publique le nécessitent
b) A Bruxelles
L'article 52bis de la loi du 8 avril 1965 dispose que la phase préparatoire court de la saisine du juge de la jeunesse par le parquet jusqu'à la communication du dossier au ministère public après clôture des investigations.
La durée de la procédure préparatoire est limitée à six mois.
Il n'y a pas de sanction en cas de dépassement du délai.
Le délai est suspendu entre l'acte d'appel et l'arrêt de la cour d'appel chaque fois qu'un appel est interjeté durant la phase préparatoire.
Lorsque le mineur fait l'objet d'une mesure provisoire de placement en régime éducatif fermé, le délai n'est pas d'application et la mesure peut être renouvelée conformément aux alinéas 7 et 8 de l'article 52quater de la loi du 8 avril 1965 aussi longtemps que nécessaire.
4. La procédure au fond
a) La saisine du tribunal de la jeunesse
A Bruxelles, le parquet dispose d'un délai de deux mois à partir de la fin de la phase préparatoire pour citer le mineur à comparaître devant le tribunal de la jeunesse (art. 52bis de la loi du 8 avril 1965).
En région unilingue de la Communauté française, l'article 104 du CPAJPJ dispose qu'à partir de la communication du dossier, le ministère public dispose d'un délai de deux mois pour citer le jeune à comparaître devant le tribunal de la jeunesse ou l'informer de sa décision de classer l'affaire sans suite. Toutefois, puisque la phase préparatoire prend fin le jour du jugement rendu au terme de la procédure au fond (et non le jour de la communication du dossier comme à Bruxelles), il appartient donc au parquet de saisir le tribunal de la jeunesse suffisamment à temps pour que l'affaire puisse être traitée dans le délai.
Le dépassement de ce délai de deux mois n'est pas sanctionné.
Si le ministère public saisit le tribunal de la jeunesse par citation, l'article 46 de la loi du 8 avril 1965 dispose que le délai de citation, c'est-à-dire le délai qui doit exister entre le lendemain du jour de la signification de la citation par huissier de justice jusqu'à l'audience, est de dix jours. Comme en matière correctionnelle, le délai est augmenté en fonction de la distance conformément à ce qui est prévu à l'article 184 du Code d'instruction criminelle.
Si le ministère public convoque les intéressés devant le tribunal de la jeunesse par un avertissement motivé (art. 45 de la loi du 8 avril 1965), la loi ne prévoit pas qu'un délai doit exister entre l'avertissement et le jour de l'audience.
b) L'accès au dossier
Au plus tard, les avocats peuvent prendre connaissance du dossier de la procédure à partir du jour de la signification de la citation.
c) Le traitement du dossier par le tribunal de la jeunesse
Il n'est prévu aucun délai dans lequel le tribunal de la jeunesse doit statuer sinon que, pour rappel, en région unilingue de la Communauté française le CPAJPJ dispose que le jugement au fond doit être rendu au plus tard neuf mois après le début de la phase préparatoire.
d) Les voie de recours
Les délais dans lesquels les voie de recours peuvent être exercées sont ceux prévus en matière correctionnelle.
1° L'opposition (art. 187 du Code d'instruction criminelle)
La partie défaillante peut faire opposition au jugement dans les quinze jours qui suivent le jour de sa signification.
Dans l'hypothèse où la signification du jugement n'a pas été faite en parlant à sa personne, la partie défaillante bénéficie d'un délai extraordinaire de quinze jours qui court à partir du jour qui suit celui où il a pris connaissance du jugement.
2° L'appel (art. 203 et 205 du Code d'instruction criminelle)
Le délai d'appel est de trente jours.
Lorsque le jugement est rendu contradictoirement à l'égard de l'appelant, le délai débute le jour du prononcé du jugement.
A l'égard du défaillant, le délai débute le jour de la signification à sa personne ou à son domicile.
Le ministère public dispose d'un délai supplémentaire de dix jours pour interjeter appel, après que le mineur ou les civilement responsables ont interjeté appel. Suite à l'arrêt du 6 juin 2019 (96/2019) de la Cour constitutionnelle, il est admis que le même délai est accordé au mineur et aux civilement responsables en cas d'appel du parquet.
Lorsque l'appel est dirigé contre la partie civile, celle-ci a un délai supplémentaire de dix jours pour interjeter appel contre le mineur et ses civilement responsables.
Enfin, l'article 205 du Code d'instruction criminelle dispose que le parquet général près la Cour d'appel bénéficie d'un délai de 40 jours à dater du prononcé pour interjeter appel.
3° Le pourvoi en cassation
Le pourvoi en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel doit être dans les quinze jours de son prononcé.
5. La révision des mesures
a) La révision d'office ou à la demande du parquet, de certains services ou de certaines personnes
En région unilingue de la Communauté française, les juridictions de la jeunesse peuvent d'office procéder à tout moment à la révision des mesures. Le parquet et le directeur de l'établissement auquel le jeune est confié peuvent également demander cette révision à tout moment (art. 113 CPAJPJ).
Il en est de même à Bruxelles sauf que la demande peut également être introduite aux personnes qui se sont vues confier le mineur et pas seulement aux établissement (art. 60 de la loi du 8 avril 1965).
b) La révision à la demande du mineur et d'autres parties
En région unilingue de la Communauté française, l'article 113 du CPAJPJ dispose que les juridictions de la jeunesse peuvent être saisies d'une demande de révision par requête du jeune, des personnes qui exercent l'autorité parentale à son égard ou des personnes qui l'hébergent en droit ou en fait, après l'expiration d'un délai de six mois à compter du jour du jugement qui ordonne la mesure.
Ce délai de six mois ne doit pas être respecté si l'objet de la révision consiste à prendre en considération le résultat d’une offre réparatrice après le prononcé du jugement, hypothèse visée à l'article 117, § 1er, al. 6 du CPAJPJ.
La partie qui a déposé la requête ne peut pas introduire une nouvelle requête portant sur le même objet avant l'expiration d'un délai de six mois à compter du jour de la dernière décision de rejet de sa demande.
A Bruxelles, l'article 60 de la loi du 8 avril 1965 instaure un système comparable, à trois différences près :
- Les personnes qui peuvent déposer la requête sont, outre le jeune, les père, mère, tuteurs ou personnes qui ont la garde du mineur ;
- Les délais ne sont pas de six mois mais d'un an qu'il s'agisse du délai initial dans lequel la révision peut être demandée pour la première fois ou du délai dans lequel une nouvelle requête peut être introduite par la partie dont une de révision précédente a été rejetée ;
- Le point de départ du délai initial n'est pas le jour du jugement qui ordonne la mesure, mais le jour où la décision ordonnant la mesure est devenue définitive, c'est-à-dire le jour où elle n'est plus susceptible de recours.
c) La révision obligatoire
En région unilingue de la Communauté française, l'article 113, § 4 du CPAJPJ dispose que :
Toute mesure prise au fond, à l'exception de la réprimande et de la mesure d'éloignement du milieu de vie, est réexaminée en vue d'être confirmée, rapportée ou modifiée avant l'expiration d'un délai d'un an à compter du jour du jugement.
Toute mesure d'éloignement du milieu de vie prise au fond est réexaminée en vue d'être confirmée, rapportée ou modifiée avant l'expiration du délai de six mois à compter du jour du jugement.
A Bruxelles, l'article 60 de la loi du 8 avril 1965 prévoit un système similaire sinon que :
- Toute mesure prise par jugement, à l'exception de la réprimande et du placement en IPPJ, doit être réexaminée en vue d'être confirmée, rapportée ou modifiée avant l'expiration du délai d'un an à compter du jour où la décision est devenue définitive.
- Le placement en IPPJ décidé par jugement doit être réexaminée en vue d'être confirmée, rapportée ou modifiée avant l'expiration du délai de six mois à compter du jour où la décision est devenue définitive.
6. Les mesures provisoires
a) Absence de délai de saisine
Le ministère public peut demander une mesure provisoire à tout moment tant que le jugement au fond n'a pas été rendu.
Il n'y a pas de délai à respecter entre la demande du ministère public et l'audience lors de laquelle la demande sera débattue.
b) Les voies de recours (art. 52 de la loi du 8 avril 1965)
Les ordonnances statuant sur une mesure provisoire ne sont pas susceptible d'opposition.
Le délai d'appel est identique à celui prévu pour les jugements au fond, à l'exception des appels dirigés contre les ordonnances qui placent le mineur en IPPJ à régime éducatif fermé.
Le délai d'appel court à partir soit de la remise de la copie de l'ordonnance par le greffier soit à partir du jour où l'intéresse a eu connaissance de la notification de l'ordonnance par pli judiciaire.
La chambre de la jeunesse de la cour d'appel doit statuer dans les deux mois au plus tard à compter de l'acte d'appel. Toutefois, aucune sanction n'est prévue en cas de dépassement du délai.
c) La révision
Que ce soit en région unilingue de la Communauté française ou à Bruxelles, sauf pour les mesures de placement en IPPJ à régime fermé, les délais relatifs à la révision facultative des mesures sont les mêmes que pour les mesures prononcées au fond.
Par contre, il n'y a pas de révision obligatoire.
d) Le placement provisoire en régime éducatif fermé
Le placement en IPPJ à régime éducatif fermé ne peut être prononcé que si les conditions pour prononcer la mesure au fond sont remplies de même que des conditions supplémentaires spécifiques au fait qu'il est prononcé à titre de mesure provisoire.
En région unilingue de la Communauté française, la matière est réglée par l'article 105 du CPAJPJ et, à Bruxelles, par l'article 52quater de la loi du 8 avril 1965. Le régime applicable à cette mesure est similaire sur les deux territoires du point de vue des délais.
Le premier placement a une durée maximale de trois mois.
Il peut être renouvelé une fois pour autant que le renouvellement intervienne avant la fin du premier délai de trois mois et que différentes conditions soient remplies.
Ensuite, la mesure peut être prolongée de mois en mois pour autant que, d'une part, certaines conditions particulières soient réunies et que, d'autre part, le renouvellement intervienne avant la fin de la mesure précédente.
L'appel doit être interjeté dans un délai de quarante-huit heures qui court à l'égard du ministère public à compter de la communication de la décision et à l'égard des autres parties en cause à compter soit de la remise de la copie de l'ordonnance par le greffier soit à partir du jour où l'intéresse a eu connaissance de la notification de l'ordonnance par pli judiciaire.
Le délai de citation devant la Cour est de trois jours.
La chambre de la jeunesse de la cour d'appel rendre son arrêt dans les quinze jours ouvrables à compter de l'acte d'appel. Si le délai est dépassé, la mesure cesse d'être d'application. Le délai est toutefois suspendu pendant la durée de la remise accordée à la demande de la défense.
Concernant la révision, les personnes qui peuvent introduire une demande dans la procédure au fond peuvent également le faire à l'égard d'une mesure de placement provisoire en IPPJ à régime éducatif fermé. Toutefois, leur demande peut être introduite après un délai d'un mois et non de six mois en région unilingue de la Communauté française ou un an à Bruxelles. Le point de départ du délai n'est pas le même sur les deux territoires. En région unilingue de la Communauté française, il s'agit du jour du jugement. A Bruxelles, il s'agit du jour où la décision est devenue définitive.
En cas de refus, une nouvelle demande peut être introduite par le requérant un mois après la décision de rejet. Sur les deux territoires, ce délai d'un mois débute le jour de cette décision.
7. Les mesures d'investigation
Aucun délai particulier n'est fixé pour la réalisation des investigations.
A Bruxelles, l'article 50 de la loi du 8 avril 1965 dispose notamment lorsque le tribunal de la jeunesse fait procéder à une étude sociale, il ne peut, sauf en cas d'extrême urgence, prendre ou modifier sa décision, qu'après avoir pris connaissance de l'avis du service social compétent, à moins que cet avis ne lui parvienne pas dans le délai qu'il a fixé et qui ne peut dépasser septante-cinq jours.
En région unilingue de la Communauté française, l'article 99 du CPAJPJ réduit le délai de 75 jours à 45 jours.
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