6 - The penal response to the minor
1- Le jugement par le juge pour enfants et le Tribunal des enfants
Art. L423-4 Code de la justice pénale des mineurs : mesures relatives aux décisions sur la poursuite.
Art. L521-1 ; L521-7 à L521-25 CPJM : mesures relatives au jugement devant le juge des enfants et le tribunal pour enfants.
1.1 La procédure de mise à l'épreuve éducative
Art. L423-4 CJPM: Consécration de la mise à l’épreuve éducative des mineurs en matière de délits et contraventions de la 5ème classe.
Par principe, les poursuites se déroulent en trois phases (Art. L521-1 CJPM) :
- 1ère audience : la juridiction statut sur la culpabilité de l’auteur et le cas échéant sur l’action civile et sur la période de mise à l’épreuve. Cette audience a lieu dans un délai de dix jours à trois mois suivant la saisine ( L521-7 à L521-12 CJPM).
- Période de mise à l’épreuve éducative ( L521-13 à L521-23 CJPM), sous contrôle du juge des enfants (Art. L521-13 et L521-15 CJPM)
La mesure peut prendre la forme de (Art. L521-14 CJPM) :
1° Une expertise médicale ou psychologique ;
2° Une mesure judiciaire d'investigation éducative ;
3° Une mesure éducative judiciaire provisoire ;
4° Un contrôle judiciaire ou une assignation à résidence avec surveillance électronique.
- 2ème audience : le juge se prononce sur les sanctions, et le cas échéant sur l’action civile.
Possibilité d’appliquer le même schéma pour les mineurs âgés de 13 ans et plus si la peine est d’au moins 3 ans devant le tribunal pour enfants.
1.2 Audience unique décidée par le juge pour enfants ou le Tribunal des enfants
Par une décision motivée, après avoir recueilli les observations des parties présentes à l’audience, la juridiction peut décider de statuer par audience unique lorsque (Art.L521-2, al. 1 CJPM) :
- La juridiction se considère suffisamment informée sur la personnalité du mineur ;
- La juridiction n’estime pas nécessaire d’ouvrir une période de mise à l’épreuve éducative au vu des faits commis par le mineur et de sa personnalité.
Elle peut prononcer une dispense de mesure éducative, un avertissement judiciaire, une mesure éducative judiciaire ou une peine à la condition de l’existence d’un antécédent éducatif (Art. L521-2, al. 2 CJPM)
1.3 Saisine du Tribunal pour enfants aux fins d'audience unique
Le procureur de la République peut poursuivre, à titre exceptionnel, le mineur devant le tribunal pour enfant aux fins de jugement en audience unique lorsque (Art.L423-4, al. 3 CJPM) :
- Conditions tenant au quantum de la peine:
- Mineur de moins de 16 ans : La peine encourue est supérieure ou égale à 5 ans d’emprisonnement.
- Mineur de plus de 16 ans : La peine encourue est supérieure ou égale à 3 ans d’emprisonnement.
- Conditions tenant à la situation du mineur
- Antécédent éducatif: le mineur a déjà fait l’objet d’une mesure éducative, judicaire d’investigation éducative, de sûreté, d’une déclaration de culpabilité ou d’une peine prononcée dans le cadre d’une autre procédure et ayant donné lieu à un rapport datant de moins d’un an.
- Le mineur également poursuivi pour le délit de refus de se soumettre aux opérations de prélèvement prévus par l’ 55-1 CPP.
1.4 Jurisprudences
- Cour de cassation, Chambre criminelle, n°06-85.687, 12 septembre 2007 : Le procureur de la République de Nantes a requis un prélèvement biologique destiné à permettre l'identification de l'empreinte génétique d'Y... Mohammed, mineur. Ce dernier a été déclaré coupable d'agressions sexuelles par jugement du tribunal pour enfants, en date du 4 mai 2004. Il est ordonné une mesure de protection judiciaire jusqu'à sa majorité. A deux reprises, ce dernier a refusé de se soumettre au prélèvement. En conséquence, il a été poursuivi et condamné sur le fondement de l'article 706-56 du code de procédure pénale. Pour infirmer le jugement, la cour d’appel relève notamment que les dispositions de l'article R. 53-14 du code de procédure pénale sur lesquelles reposait l'obligation, pour Y... Mohammed, de se soumettre au prélèvement de ses empreintes génétiques, sont illégales. Le procureur de la République se pourvoi en cassation.
La question se pose de savoir si une mesure de protection judiciaire peut être assimilée à une condamnation au sens de l’article 706-54 al. 1er du code de procédure pénale.
La Cour de cassation rappelle que « c'est à tort que la cour d'appel a ainsi statué, les dispositions réglementaires déclarées illégales ne pouvant avoir aucune incidence sur les éléments constitutifs du délit prévu par l'article 706-56 du code de procédure pénale ». Toutefois, « la mesure de protection judiciaire prononcée à l'égard d'Y... Mohammed par le tribunal pour enfants le 4 mai 2004 ne constitue pas une condamnation pénale permettant, en application des dispositions de l'article 706-54, alinéa 1er, du code de procédure pénale, l'inscription au fichier national automatisé des empreintes génétiques ».
Le pourvoi du procureur de la République est rejeté.
2. Le mineur récidiviste
Juridiction : Conseil constitutionnel
Nom : n° 2007-554 DC
Date : 9 août 2007
Portée géographique : portée nationale
Thèmes : Constitutionnalité de la loi renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs– L’application du principe d’atténuation de la peine pour un mineur de 16 ans récidiviste.
Résumé de l’affaire :
L’art. 5, I, 2° de la loi renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs prévoit que, dans le cas où des mineurs de plus de seize ans se trouvent une nouvelle fois en état de récidive légale pour une infraction grave, l'atténuation de la peine est écartée, sauf si la juridiction en décide autrement. Les requérants soutiennent que ces dispositions méconnaissent le principe fondamental reconnu par les lois de la République en matière de justice des mineurs.
Problème de droit :
Le fait pour une juridiction d’écarter le principe d’atténuation des peines lorsqu’un mineur de 16 ans ou plus commet certaines infractions en état de récidive légale est-il conforme à la Constitution ?
Portée / conclusion :
Le Conseil reconnait que « l'atténuation de la responsabilité pénale des mineurs en fonction de l'âge, comme la nécessité de rechercher le relèvement éducatif et moral des enfants délinquants par des mesures adaptées à leur âge et à leur personnalité, prononcées par une juridiction spécialisée ou selon des procédures appropriées, ont été constamment reconnues par les lois de la République depuis le début du vingtième siècle » (Cons. 24).
Toutefois, elle ajoute que « les dispositions critiquées maintiennent le principe selon lequel, sauf exception justifiée par l'espèce, les mineurs de plus de seize ans bénéficient d'une atténuation de la peine ». De plus, l’atténuation de peine ne s'applique pas aux mineurs de plus de seize ans lorsque certaines infractions ont été commises une nouvelle fois en état de récidive légale, « la juridiction peut en décider autrement » (Cons. 25). Dès lors, une juridiction peut décider d’écarter le principe d’atténuation de la peine pour un mineur de 16 ans ou plus qui commet certaines infractions en état de récidive légale, dès lors que ce choix est justifié.
L’écartement par une juridiction du principe d’atténuation des peines à l’encontre d’un mineur de plus de 16 ans récidiviste est conforme à la Constitution.
Cour de cassation, Chambre criminelle, n° 09-87.691, 16 novembre 2010
Juridiction : Cour de cassation, Chambre criminelle
Nom : n° 09-87.691
Date : 16 septembre 2010
Portée géographique : Portée nationale
Thèmes : Définition du premier terme de la récidive.
Résumé de l’affaire :
- X… a été condamné lorsqu’il était mineur par le tribunal pour enfants à quatre mois d'emprisonnement pour délit de violences. Suite à sa majorité, M. X… a été à nouveau mis en examen pour violence volontaire. Par un arrêt infirmatif, la cour d’appel condamne M. X… selon le régime de la récidive légale car il a été précédemment définitivement condamné par le tribunal pour enfants du Mans pour des faits similaires. M. X… se pourvoi en cassation au motif que le premier terme de la récidive légale résultant de la commission du même délit ou d'un délit similaire ne peut être constitué par une condamnation prononcée par une juridiction pour mineurs, dans l'hypothèse où l'infraction suivante est constituée une fois la personne devenue majeure.
Problème de droit :
Des mesures ou sanctions éducatives prononcées contre un mineur peuvent-elles constituer le premier terme de la récidive ?
Portée / conclusion :
La Cour de cassation rappelle « qu'il se déduit de l'article 20-2 de l'ordonnance du 2 février 1945 que seules des mesures ou sanctions éducatives prononcées contre un mineur ne peuvent constituer le premier terme de la récidive ».
Or, M. X… a été condamné à une peine d’emprisonnement de quatre mois. Les mesures ou sanctions éducatives prononcées contre un mineur ne peuvent constituer le premier terme de l'état de récidive. Toutefois, une condamnation à une peine privative de liberté en tant que mineur, comme c’est le cas en l'espèce, constitue le premier terme de la récidive. Dès lors, la cour d’appel n’a pas méconnu le sens des textes en considérant que M.X… est en état de récidive légale.
Le pourvoi est rejeté.
3 - Les spécificités du casier judiciaire pour mineur
Art L631-1 ; Art. L631-2 ; Art. L11-4 ; Art. L111-6 Code de la justice pénale des mineurs (non modifiés par la réforme).
Art. L631-3 ; Art. L631-4 ; Art. L11-1 ; Art. L112-2 ; Art. L112-3 Code de la justice pénale des mineurs (modifiés par la réforme).
3.1 L'inscription au casier judiciaire
Art. L631-1 CJPM : Les condamnations, les déclarations de culpabilité assorties d'une dispense de peine, d'une dispense de mesure éducative ou d'une déclaration de réussite éducative, les décisions prononçant des mesures éducatives rendues à l'égard d'un mineur, lors du prononcé de la sanction, ainsi que les compositions pénales sont inscrites sur le casier judiciaire.
→ L’inscription figure au bulletin n° 1 uniquement (Art. L631-2 CJPM).
→ Si une dispense de mesure éducative ou une déclaration de réussite éducative est accordée, la juridiction la prononçant peut décider de ne pas la mentionner sur le casier judiciaire (Art. L111-6 CJPM).
3.2 L'effacement du casier judiciaire
Les décisions relatives aux mesures éducatives, aux dispenses de mesure éducative et aux déclarations de réussite éducative sont retirées automatiquement à l'expiration d'un délai de trois ans à compter du jour où la mesure est devenue définitive (Art. L631-3, al. 1 CJPM et Art. 769, al. 4, 7° CPP).
Art. 769 CPP prévoit les autres cas de retrait automatique, et notamment pour les :
- Dispenses de peines : à l'expiration d'un délai de 3 ans à compter du jour où la condamnation est devenue définitive ;
- Condamnations pour contravention : à l'expiration d'un délai de 3 ans à compter du jour où ces condamnations sont devenues définitives ou 4 ans lorsqu'il s'agit d'une contravention dont la récidive constitue un délit ;
- Mentions relatives à la composition pénale : à l'expiration d'un délai de 3 ans à compter du jour où l'exécution de la mesure a été constatée, si la personne n'a pas, pendant ce délai, soit subi de condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle, soit exécuté une nouvelle composition pénale.
Concernant les condamnations à une peine criminelle ou correctionnelle devenues définitives, le tribunal pour enfant peut, à la requête du mineur, du Ministère public ou d'office, décider de leur retrait du casier judiciaire lorsque (Art. L631-4 CJPM) :
- S’est écoulé un délai de 3 ans à partir de la décision (même si le mineur a atteint la majorité depuis la décision) et ;
- Le relèvement éducatif du mineur est considéré comme acquis.
3.3 Jurisprudences
- Cour de cassation – Chambre criminelle, 7 janvier 2020, n°19-80.058 : Un mineur se voit refuser par le tribunal pour enfants d’Evry la suppression de la fiche de son casier judiciaire concernant la condamnation du chef de viol et violences aggravés. Le refus de suppression du casier judiciaire a été décidé par les juges du fond sans qu’aucun motif n’ait été invoqué à l’appui. Or, la décision du refus de suppression du casier judiciaire d’une condamnation d’un mineur doit être motivée. Ainsi, la Cour énonce que “ [m]ais attendu qu'en se déterminant ainsi, sans examiner, comme il y était invité, les éléments produits par le requérant au soutien de sa requête faisant valoir qu'au vu de son parcours scolaire et de son insertion professionnelle, sa rééducation apparaît acquise, le tribunal n'a pas justifié sa décision ”.
La Cour de cassation casse et annule le jugement du tribunal pour enfants d’Evry, et décide du renvoi de la cause et des parties devant le tribunal pour enfants d’Evry, autrement composé.
4. Les mesures éducatives judiciaires (MEJ)
Art. L112-1 CJPM : « La mesure éducative judiciaire vise la protection du mineur, son assistance, son éducation, son insertion et son accès aux soins. »
4.1 Définition et contenu
La mesure éducative judiciaire est une sanction, qui consiste en un accompagnement individualisé du mineur construit à partir d'une évaluation de sa situation personnelle, familiale, sanitaire et sociale. La juridiction peut également prononcer un ou plusieurs des modules, interdictions ou obligations suivants (Art. L112-2 CJPM ; ancien art. 15-1 de l’Ord. n°45-174 du 2 février 1945) :
- Un module d'insertion : orientation du mineur vers une prise en charge scolaire ou visant à son insertion sociale, scolaire ou professionnelle ; accueil de jour ; placement dans un internat scolaire ; placement dans une institution ou un établissement public ou privé d'enseignement ou de formation professionnelle ( L112-5 à L112-7 CJPM).
- Un module de réparation : activité d'aide ou de réparation à l'égard de la victime ou dans l'intérêt de la collectivité ; médiation entre le mineur et la victime ( L112-8 à L112-10 CJPM).
- Un module de santé : orientation du mineur vers une prise en charge sanitaire adaptée à ses besoins ; placement dans un établissement de santé, à l'exclusion des services de psychiatrie ; placement dans un établissement médico-social ( L112-11 à L.112-13 CJPM).
- Un module de placement chez un membre de la famille, une personne digne de confiance, un établissement du secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse ou une institution ou un établissement éducatif privé habilité, à l’exception des centres éducatifs fermés ( L112-14 à L112-15 CJPM).
Les parents du mineur continuent à exercer tous les attributs de l'autorité parentale. Toutefois, la personne, le service ou l'établissement auquel l'enfant est confié accomplit tous les actes usuels relatifs à sa surveillance et à son éducation (Art. L113-1 du CJPM).
- Une interdiction de paraître pour une durée qui ne saurait excéder un an, dans le ou les lieux dans lesquels l'infraction a été commise et qui sont désignés par la juridiction, sauf lieux dans lesquels le mineur réside habituellement.
- Une interdiction d'entrer en contact avec la victime ou les coauteurs ou complices, désignés par la juridiction, pour une durée d'un an maximum.
- Une interdiction d'aller et venir sur la voie publique entre 22 heures et 6 heures sans être accompagné de l'un de ses représentants légaux, pour une durée de six mois maximum.
- L'obligation de remettre un objet détenu ou appartenant au mineur et ayant servi à la commission de l'infraction ou qui en est le produit.
- L'obligation de suivre un stage de formation civique, d'une durée qui ne peut excéder un mois, ayant pour objet de rappeler au mineur les obligations résultant de la loi.
4.2 Mise en oeuvre des mesures
Les mesures peuvent être prononcées alternativement ou cumulativement (Art. L112-3, al. 1 CJPM).
L’interdiction de paraître sur les lieux de l’infraction (Art. L112-2, 5° CJPM), l’interdiction de contact (Art. L112-2, 6° CJPM), l’interdiction de circuler sur la voie publique passé 22 heures (Art. L112-2, 7° CJPM), l’obligation de remettre l’objet ayant servi au crime (Art. L112-2, 8° CJPM), et l’obligation de stage de formation civique (Art. L112-2, 9° CJPM) ne concerne que les mineurs de plus de 10 ans (Art. L112-3, al. 2 CJPM).
Les mesures peuvent être prononcées même si l'intéressé est devenu majeur au jour de la décision (Art. L112-4, al. 1 CJPM).
→ Elles prennent fin au plus tard lorsqu'il atteint vingt-et-un ans.
→ Pour certaines mesures, l’accord du majeur est nécessaire (accueil de jour, placement…).
La décision ordonnant une MEJ désigne un service éducatif de milieu ouvert de la protection judiciaire de la jeunesse chargé de l'exécution et la coordination de cette mesure (Art. D112-1 CJPM).
Le déroulement de la mesure est placé sous le contrôle du juge des enfants, qui peut, à tout moment, modifier les modalités et le contenu de la mesure ou en ordonner la mainlevée, après l'audition du mineur, assisté de son avocat, ainsi que celle de ses représentants légaux (Art. L611-1, al. 1 CJPM).
→ Si le mineur ou ses représentants légaux régulièrement convoqués à la dernière adresse indiquée ne comparaissent pas, le juge des enfants se prononce sur les mesures sans audition (Art. L611-1, al. 3 CJPM).
4.3 Durée des mesures
La mesure éducative judiciaire (MEJ) est prononcée pour une durée n’excédant pas cinq années (Art. L112-4, al. 1 CJPM).
Aucune MEJ ne peut être prononcée au-delà des 21 ans de la personne (Art. L112-4, al. 2 CJPM).
Durées spécifiques aux modules, interdictions ou obligations :
- L’accueil de jour : ne peut excéder une année, sauf renouvellement ( L112-6, al. 2 CJPM) ;
- Le module de réparation : ne peut excéder une année ( L112-9 CJPM) ;
- Le module de placement : ne peut excéder une année, sauf renouvellement ( L112-15, al. 3 et 4 CJPM) ;
- Les interdictions de paraître et d’entrer en contact : ne peut excéder une année ( L112-2, 5° et 6° CJPM) ;
- L’interdiction d’aller et venir sur la voie publique entre 22 heures et 6 heures : ne peut excéder six mois ( L112-2, 7° CJPM) ;
- L’obligation de suivre un stage de formation juridique ne peut excéder un mois ( L112-2, 9° CJPM).
4.4 Jurisprudences
- Cour de cassation – Chambre criminelle, 21 juin 2006, n° 06-82.516 : Le requérant M. Jocelyn X forme un pourvoi en cassation contre l’arrêt de la cour d’appel de Douai en date du 7 février 2006. Cet arrêt, dans l’information ouverte contre lui pour meurtre aggravé, a confirmé l’Ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire. M. Jocelyn X était mineur au moment des faits qui lui sont reprochés mais est devenu entre-temps majeur au moment où la prolongation de sa détention a été décidée. Le requérant fait grief au juge des libertés et de la détention d’avoir statué sans avoir préalablement consulté le service de la protection judiciaire, formalité imposée par l’article 12 de l’ordonnance du 2 février 1945. La question s’est posée de savoir si le service de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) doit formuler une proposition éducative à une personne devenue majeure lorsque le magistrat du siège statue sur la détention de cette dernière. La Cour conclut que le rapport prévu par l’article 12 de l’Ordonnance du 2 février 1945, qui a pour finalité d’imposer qu’une proposition éducative soit formulée par le service de la protection judiciaire de la jeunesse pour tout mineur à l’encontre duquel une mesure de placement en détention ou de prolongation de celle-ci est envisagée, n’est plus exigé s’agissant d’une personne devenue majeure au moment où le magistrat statue sur sa détention ». Le pourvoi est rejeté.
- Conseil constitutionnel, Décision n° 2002-461 DC, 29 août 2002: Est remise en question la conformité à la Constitution des articles 11, 12 et 13 de la Loi d'orientation et de programmation pour la justice, qui insèrent en matière de justice pénale des mineurs le principe de sanction éducative. Les deux saisines reprochent à ces dispositions de méconnaître le PFLRF qui exclurait la responsabilité pénale des enfants et consacrerait la primauté de l'éducatif sur le répressif (cons. 31).
Le Conseil rappelle que « l'atténuation de la responsabilité pénale des mineurs en fonction de l'âge, comme la nécessité de rechercher le relèvement éducatif et moral des enfants délinquants par des mesures adaptées à leur âge et à leur personnalité, prononcées par une juridiction spécialisée ou selon des procédures appropriées, ont été constamment reconnues par les lois de la République depuis le début du vingtième siècle » (cons. 26). Toutefois, le Conseil considère que « les principes constitutionnels propres à la justice des mineurs ne s'opposent pas à ce que leur soient infligées des sanctions telles que celles énumérées ci-dessus, lesquelles ont toutes, au demeurant, une finalité éducative », dès lors qu’en application du principe de proportionnalité des peines, « ces sanctions prendront naturellement en compte les obligations familiales et scolaires des intéressés ». Les sanctions éducatives ne sont donc pas contraires au PFRLR de la justice pénale des mineurs, sous réserve qu’elles soient appréciées au regard des obligations spécifiques incombant au mineur (cons. 32). Les articles instaurant le principe de sanction éducative sont conformes à la Constitution.
5. Les mesures éducatives judiciaires provisoires
5.1 Définition et contenu
La mesure éducative judiciaire peut être prononcée à titre provisoire à tous les stades de la procédure avant le prononcé de la sanction : déferrement, audience de culpabilité, pendant la période de mise à l’épreuve éducative (Art. L323-1, al. 1 CJPM).
Elle ne peut alors comporter que les modules et interdictions prévus aux 1° à 7° de l'article L112-2 qui peuvent être prononcés alternativement ou cumulativement (Art. L323-1, al. 2 CJPM) :
- Un module d'insertion : orientation du mineur vers une prise en charge scolaire ou visant à son insertion sociale, scolaire ou professionnelle ; accueil de jour ; placement dans un internat scolaire ; placement dans une institution ou un établissement public ou privé d'enseignement ou de formation professionnelle (v. L112-5 à L112-7 CJPM).
- Un module de réparation : activité d'aide ou de réparation à l'égard de la victime ou dans l'intérêt de la collectivité ; médiation entre le mineur et la victime (v. L112-8 à L112-10 CJPM).
- Un module de santé : orientation du mineur vers une prise en charge sanitaire adaptée à ses besoins ; placement dans un établissement de santé, à l'exclusion des services de psychiatrie ; placement dans un établissement médico-social (v. L112-11 à L112-13 CJPM).
- Un module de placement chez un membre de la famille, une personne digne de confiance un établissement du secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse ou une institution ou un établissement éducatif privé habilité, à l’exception des centres éducatifs fermés (v. L112-14 à L112-15 CJPM).
Les parents du mineur continuent à exercer tous les attributs de l'autorité parentale. Toutefois, la personne, le service ou l'établissement auquel l'enfant est confié accomplit tous les actes usuels relatifs à sa surveillance et à son éducation (Art. L113-1 CJPM).
- Une interdiction de paraître pour une durée qui ne saurait excéder un an, dans le ou les lieux dans lesquels l'infraction a été commise et qui sont désignés par la juridiction, excepté les lieux dans lesquels le mineur réside habituellement.
- Une interdiction d'entrer en contact avec la victime ou les coauteurs ou complices, désignés par la juridiction, pour une durée d'un an maximum.
- Une interdiction d'aller et venir sur la voie publique entre 22 heures et 6 heures sans être accompagné de l'un de ses représentants légaux, pour une durée de six mois maximum.
Le placement du mineur peut également être ordonné auprès d'un service de l'aide sociale à l'enfance jusqu'à sa majorité (Art. L323-1, al. 3 CJPM).
5.2 Mise en oeuvre des mesures
Les mesures prévues aux 1° à 7° de l'article L112-2 peuvent être prononcées cumulativement ou alternativement (Art. L323-1, al. 2 CJPM).
La mise en œuvre des MEJP est similaire à celle des MEJ et est régies par les articles L112-1 à L112-15 CJPM (Art. L323-1, al. 1 CJPM).
La mesure est prononcée à l'issue d'une audition avec le mineur, son avocat et ses représentants légaux (Art. L323-2, al. 1 CJPM).
Si le mineur ou ses représentants légaux régulièrement convoqués à la dernière adresse indiquée ne comparaissent pas, le juge des enfants se prononce sur les mesures sans audition (Art. L323-2, al. 2 CJPM).
Le déroulement de la mesure est placé sous le contrôle du juge des enfants, qui peut, à tout moment, modifier les modalités et le contenu de la mesure ou en ordonner la mainlevée (Art. L323-2, al. 4 CJPM)
Les mesures peuvent être prononcées même si l'intéressé est devenu majeur au jour de la décision (Art. L323-3 CJPM). Elles prennent fin au plus tard lorsqu'il atteint 21 ans.
→ Pour certaines mesures, l’accord du majeur est nécessaire (accueil de jour, placement…).
La décision ordonnant une MEJP désigne le service éducatif de milieu ouvert de la protection judiciaire de la jeunesse auquel l'exécution et la coordination de cette mesure sont confiées (Art. D323-2, al. 1 CJPM).
La MEJP peut se cumuler avec une mesure judiciaire d’investigation éducative (MJIE) et toutes les mesures de sûreté (CJ, ARSE, détention provisoire).
5.3 Durée des mesures
Lorsqu'elle est prononcée en cours d'instruction, la MEJP est prononcée pour une durée d’un an renouvelable (Art. L432-2, al. 2 CJPM).
Elle dure le temps de la procédure si elle est prononcée :
- À la suite d’un déferrement : jusqu’à l’audience d’examen de la culpabilité qui interviendra dans un délai compris entre 10 jours et 3 mois.
- À l’audience de culpabilité ou au cours de la période de mise à l’épreuve éducative : jusqu’à l’audience de prononcé de la sanction, qui interviendra dans un délai compris entre 6 et 9 mois.
5.4 Jurisprudences
- Conseil constitutionnel, Décision n°2011-635 DC, 4 août 2011 : Les requérants estiment qu’en permettant l'assignation à résidence avec surveillance électronique des mineurs âgés de treize à seize ans dans les cas où ils peuvent être placés sous contrôle judiciaire revient à assimiler l'assignation à résidence avec surveillance électronique à une mesure de détention provisoire. Le Conseil estime qu’« en permettant l'assignation à résidence avec surveillance électronique des mineurs de treize à seize ans comme une alternative au contrôle judiciaire dans des cas où le mineur ne peut pas faire l'objet d'une mesure de détention provisoire, les dispositions contestées ont institué une rigueur qui méconnaît les exigences constitutionnelles précitées ». Dès lors, le Conseil censure la possibilité d’assigner à résidence avec surveillance électronique un mineur de treize à seize ans.
- Cour de cassation, Chambre criminelle, n°21-87.007, 16 février 2022 : Le requérant, mineur, a été mis en examen des chefs de vols, extorsion, violences, arrestation, enlèvement, séquestration ou détention arbitraire, et dégradation ou destruction du bien d'autrui, aggravés, et a fait l'objet d'une incarcération provisoire. Le juge des libertés et de la détention a rendu à son égard une ordonnance de placement en détention provisoire, et une ordonnance instituant une mesure éducative judiciaire provisoire. L’appel interjeté par le requérant a confirmé l’ordonnance. Le pourvoi est formé au motif que cette mesure éducative doit être ordonnée dans la décision de placement en détention provisoire. Dès lors, en confirmant l'ordonnance de placement en détention provisoire et en ordonnant par décision séparée une mesure éducative sans faire état dans cette décision, la chambre de l'instruction aurait méconnu l'article L334-3 CJPM. La Cour de cassation considère que l'article L334-3 CJPM, faisant obligation au juge qui ordonne le placement en détention provisoire d'un mineur de prononcer une mesure éducative judiciaire provisoire, n'empêche pas que cette décision fasse l'objet d'une ordonnance distincte de celle qui prescrit le placement en détention. Le pourvoi est rejeté.
6. L'incidence de l'âge du mineur sur les sanctions
Art. L121-5 Code de Justice Pénale des Mineurs : Principe d’atténuation des peines des mineurs
« Le tribunal pour enfants et la cour d'assises des mineurs ne peuvent prononcer une peine privative de liberté supérieure à la moitié de la peine encourue.
La diminution de moitié de la peine encourue s'applique également aux peines minimales prévues par l'article 132-18 du Code Pénal.
Si la peine encourue est la réclusion criminelle ou la détention criminelle à perpétuité, elle ne peut être supérieure à vingt ans de réclusion criminelle ou de détention criminelle.
Les dispositions de l'article 132-23 du Code Pénal relatives à la période de sûreté ne sont pas applicables aux mineurs ».
Art. L121-6 CJPM : « Il ne peut être prononcé à l'encontre d'un mineur une peine d'amende supérieure à la moitié de la peine encourue ni une peine d'amende excédant 7 500 euros ».
6. 1 Garanties pour le mineur d'au moins 13 ans
- Le contrôle judiciaire : Ce contrôle est possible, en matière délictuelle, si la peine encourue est supérieure ou égale à 7 ans ou selon certaines conditions pour les peines supérieures ou égales 5 ans (Art L331-1 CJPM).
- La détention en matière délictuelle n’est possible que selon les 2 conditions prévues aux Art. L334-4 et L334-5 CJPM.
- Le placement sous assignation à résidence avec surveillance électronique est impossible (Art. L333-1 CJPM).
- La détention provisoire est impossible pour les moins de 13 ans au moment de la commission des faits (Art. L334-1 CJPM) et répond à des garanties spécifiques pour les aux mineurs entre 13 et 16 ans (Art. L334-4 ; Art. L433-2 ; Art. L433-8 ; Art. L433-4 ; Art. L423-11 ; Art. L521-10 ; Art. L521-21 CJPM).
- La peine de travaux d’intérêts généraux est impossible lorsque le mineur a moins de 16 ans au moment du prononcé de la sanction ET moins de 13 ans lors de la commission de l’infraction (Art. L122-1 CPJM).
-En cas de condamnation à l’emprisonnement, il n’est pas possible de déroger au principe de diminution des peines.
6.2 Sanction pour le mineur de plus de 16 ans
- Possibilité d’une peine visant à accomplir un contrat de service en établissement public d'insertion de la défense mentionné aux articles L130-1 à L130-5 du code du service national, sauf en cas de refus du prévenu ou en son absence à l’audience (Art. L122-2, 5° CPJM)
ATTENTION : les règles d'atténuation des peines peuvent être écartées « à titre exceptionnel et compte tenu des circonstances de l'espèce et de la personnalité du mineur ainsi que de sa situation » (Art L121-7 CJPM)
6.3 Jurisprudences
- Cour de cassation, Chambre criminelle, n°68-90.760, 11 juin 1969: Un mineur a été déféré par voie de citation directe devant un tribunal correctionnel pour défaut de permis de conduire et d’assurance, après avoir faussement affirmé aux policiers et aux juges d’être majeur de 18 ans. Or en juin 1968, au moment des faits il était mineur. En septembre 1968, alors majeur de 18 ans, il a été condamné par le tribunal correctionnel à 300 francs d’amende. Le procureur général forme un pourvoi dans l’intérêt de la loi et du condamné au motif de l’compétence du tribunal correctionnel.
La Cour rappelle que c’est l’âge au moment des faits qui détermine la juridiction compétente et les sanctions, même si au moment des poursuites l’individu est un majeur. La décision du tribunal n’est pas légale car la juridiction compétente pour statuer sur des violations alléguées contre des mineurs est le tribunal pour enfants. La Cour casse et annule le jugement du Tribunal correctionnel.
- Cour de cassation, Chambre criminelle, n°85-93.591, 3 septembre 1985: Un mineur a été envoyé devant la cour d’assises des mineurs pour un crime commis le 19 avril 1983 vers 16h. Pourtant, le mineur était né le 19 avril 1967 à 11h15. La Cour d’assises des mineurs estime que le mineur était justiciable devant elle car il était âgé de 16 ans accompli. L’avocat estime qu’étant né le 19 avril 1967, le prévenu n’avait pas atteint l’âge de 16 ans révolus au moment des faits, et donc n’était pas justiciable devant la Cour d’assises des mineurs mais devant le tribunal pour enfants.
La Cour considère que « l’âge d’une personne est déterminé par le temps écoulé depuis sa naissance, calculé d’heure à heure ». La Cour casse et annule le jugement de la cour d’appel.
- Cour de cassation, Chambre criminelle, n°87-84.337, 11 mai 1988 : Un mineur est condamné à 18 ans de réclusion criminelle avec une période de sûreté aux deux tiers de la peine pour viols et tentatives de viols aggravés, vols et tentatives de vols avec port d'arme, attentat à la pudeur commis sous la menace d'une arme, violences avec arme et menaces de mort sous condition. S’est posé la question de l’application de l’article 730-3 du CPP [alors applicable], qui prévoit en cas de condamnation pour certaines infractions une période de sûreté durant laquelle le condamné ne pourra bénéficier d’aucun aménagement de la peine prononcée à son encontre.
La Cour confirme que cet article ne trouve pas à s’appliquer aux mineurs. La Cour casse et annule l’arrêt.
- Cour de cassation, Chambre criminelle, n°07-84.830, 10 octobre 2007 : Le procureur de la République a, par voie de requête pénale, saisi le juge des enfants d'une procédure contre Jordy X..., en requérant le placement du mineur sous contrôle judiciaire assorti de l'obligation de résider dans un centre éducatif fermé. Le juge des enfants a prononcé deux mesures distinctes. La première ordonne le placement du mineur sous contrôle judiciaire assorti de l'obligation de résider dans un centre éducatif fermé. La seconde prescrit le placement du mineur dans un centre éducatif fermé. Jordy X... a interjeté appel de « l'ordonnance le plaçant dans un centre éducatif fermé ». La chambre spéciale des mineurs a confirmé la décision déférée. Jordy X… se pourvoi en cassation.
La Cour rappelle que « que le placement dans un centre éducatif fermé ne constitue qu'une modalité du contrôle judiciaire ». Dès lors, l'appel de l'ordonnance du juge des enfants du placement dans un tel établissement, même s'il ne vise pas l'ordonnance de placement sous contrôle judiciaire, relève de la compétence de la chambre de l'instruction et non de la chambre spéciale des mineurs de la cour d'appel. La Cour casse et annule la décision de la cour d’appel.
- Cour de cassation, Chambre criminelle, n°87-80.467, 17 juin 1987 : Un mineur, qui soutenait avoir 15 ans, est poursuivi pour des chefs de vol et d'infraction à la législation sur les étrangers. Le juge des enfants a ordonné son maintien en liberté au motif qu’un mineur de 15 ans bénéficiait de plein droit de l'excuse atténuante de minorité. A contrario, la cour d’appel, après avoir infirmé l'ordonnance de maintien en liberté et a ordonné son placement en détention provisoire aux fins de le faire examiner par deux experts pour déterminer son âge tout en affirmant sa remise en liberté dans le cas où les renseignements recueillis concluaient à un âge inférieur à 16 ans et si le requérant ne pouvait faire l'objet d'un placement éducatif. La cour d’appel, pour motiver sa décision indique que « l’effet de l'excuse atténuante de minorité doit être apprécié au regard de la peine encourue compte tenu de la situation pénale du mineur et notamment des conditions de la récidive ».
Or, la Cour rappelle que l’excuse de minorité ne doit être prise en compte que lors du prononcé de la peine par la juridiction de jugement. La Cour casse et annule l’arrêt.
- Cour de cassation, Chambre criminelle, n°21-82.643, 16 février 2022: [F] [P] et son épouse Mme [O] [P] ont été victimes d'une agression commise par quatre personnes. Les investigations menées ont conduit à l'arrestation des auteurs de l'agression parmi lesquels M. [W] [Z], majeur au moment des faits, un autre auteur étant, à la même date, mineur, âgé de plus de seize ans. Du fait de la minorité de l’un des accusés, ils ont été mis en accusation devant la cour d'assises des mineurs des Bouches-du-Rhône, qui les a déclarés coupables. Elle a condamné M. [Z] à huit ans d'emprisonnement. M. [Z] a interjeté appel des arrêts pénal et civil. Saisi du seul appel de M. [Z], majeur au moment des faits reprochés, le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a désigné la cour d'assises de droit commun des Alpes-Maritimes pour statuer en appel. La cour d’appel a confirmé la condamnation. Le requérant a formé un pourvoi en cassation au motif que « que l'ordonnance de mise en accusation est attributive de juridiction ; que l'appel de la décision rendue par une cour d'assises des mineurs ne pouvait être jugé que par une autre cour d'assises des mineurs, la cour d'assises des Alpes-Maritimes a excédé ses pouvoirs et violé les articles 20 et 24 de l'ordonnance du 2 février 1945, 380-1 et 380-14, 231 du Code de Procédure Pénale. »
La Cour rejeté le pourvoi au motif que « d'une part, la compétence de la cour d'assises des mineurs, édictée dans le seul intérêt des mineurs, est exceptionnelle. » D’autre part, « en cas d'appel d'un arrêt de la cour d'assises des mineurs émanant d'un seul accusé majeur, la compétence de la cour d'assises de droit commun désignée comme juridiction d'appel participe de l'objectif de valeur constitutionnelle d'une bonne administration de la justice en ce qu'elle n'induit pas les mêmes contraintes d'organisation des débats. ». Dès lors, il « en résulte que l'appel de l'arrêt pénal de la cour d'assises des mineurs est porté devant la cour d'assises de droit commun, lorsque, par l'effet des appels, seuls restent à juger des accusés majeurs à la date des faits. La cour d’assises, en ne déclinant pas sa compétence, n’a donc pas excédé ses pouvoirs. Le pourvoi est rejeté.
- Conseil constitutionnel, Décision n° 2002-461 DC, 29 août 2002 : Est remise en question la conformité à la Constitution des articles 11, 12 et 13 de la Loi d'orientation et de programmation pour la justice, qui insèrent en matière de justice pénale des mineurs le principe de sanction éducative. Les deux saisines reprochent à ces dispositions de méconnaître le PFLRF qui exclurait la responsabilité pénale des enfants et consacrerait la primauté de l'éducatif sur le répressif (cons. 31). Le Conseil rappelle que « l'atténuation de la responsabilité pénale des mineurs en fonction de l'âge, comme la nécessité de rechercher le relèvement éducatif et moral des enfants délinquants par des mesures adaptées à leur âge et à leur personnalité, prononcées par une juridiction spécialisée ou selon des procédures appropriées, ont été constamment reconnues par les lois de la République depuis le début du vingtième siècle » (cons. 26).
Toutefois, le Conseil considère que « les principes constitutionnels propres à la justice des mineurs ne s'opposent pas à ce que leur soient infligées des sanctions telles que celles énumérées ci-dessus, lesquelles ont toutes, au demeurant, une finalité éducative », dès lors qu’en application du principe de proportionnalité des peines, « ces sanctions prendront naturellement en compte les obligations familiales et scolaires des intéressés ». Les sanctions éducatives ne sont donc pas contraires au PFRLR de la justice pénale des mineurs, sous réserve qu’elles soient appréciées au regard des obligations spécifiques incombant au mineur (cons. 32). Les articles instaurant le principe de sanction éducative sont conformes à la Constitution.
7. Inscription au FIJAIT et FIJAIS
Art. L631-2 / Art. L632-1 à L632-4 / Art. L633-1 à L633-4 / Art. L634-1 Code de la justice pénale des mineurs (non modifiés par la réforme).
Art. L631-3 / Art. L631-4 / Art. L632-5 Code de la justice pénale des mineurs (modifiés par la réforme).
7.1 Le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions terroristes (FIJAIT)
Le F.I.J.A.I.T est une application automatisée d'informations nominatives tenue par le service du casier judiciaire national sous l'autorité du ministre de la Justice et le contrôle d'un magistrat.
- L’inscription des décisions
Conditions :
- Mineurs de plus de 13 ans ( L633-1 CJPM).
- Cette inscription est ordonnée par décision expresse de la juridiction ou, dans les cas prévus à l'article 706-25-4 CPP, par le procureur de la République ( L633-2 CJPM).
- L’effacement des décisions
Les informations relatives à l'identité ainsi que l'adresse ou les adresses successives du domicile sont retirées du fichier (Art. L633-3 CJPM) :
- Au décès de l'intéressé ;
- A l'expiration d’un délai de 10 ans, à compter du prononcé de la décision ou à compter de sa libération s’il exécute une peine privative de liberté sans sursis ;
- A l’expiration d’un délai de trois ans lorsqu'elles concernent une infraction mentionnée aux articles L224-1 ou L225-7 du Code de la sécurité intérieure ;
- Le mineur peut solliciter la rectification ou l'effacement des informations contenues dans le fichier dans les conditions prévues à l'article 706-25-12 du Code de procédure pénale.
- Le suivi des mineurs enregistrés
Obligations de justification et de présentation prévues par l’article 706-25-7 CPP (Art. L633-4 CJPM) :
- Pendant un délai de cinq ans à compter du prononcé de la décision.
- Pendant trois ans s'il s'agit d'une infraction mentionnée à l'article L224-1 du Code de la sécurité intérieure.
7.2 Le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (FIJAIS)
- L’inscription des décisions
Conditions :
- Mineurs de plus de 13 ans ( L632-1 CJPM).
- Cette inscription est ordonnée par décision expresse de la juridiction ou, dans les cas prévus à l'article 706-25-4 CPP, par le procureur de la République ( L632-2 CJPM).
→ Exceptionnellement, les condamnations relevant de l'article 706-47 CPP sont inscrites de plein droit (Art. L632-3 CJPM).
- L’effacement des décisions
Les informations relatives à l'identité ainsi que l'adresse ou les adresses successives du domicile sont retirées du fichier (Art. L632-4 CJPM) :
- Au décès de l'intéressé ;
- A l'expiration d’un délai de 10 ans, à compter du prononcé de la décision ou à compter de sa libération s’il exécute une peine privative de liberté sans sursis ;
- Le mineur peut solliciter la rectification ou l'effacement des informations contenues dans le fichier dans les conditions prévues à l'article 706-25-12 du Code de procédure pénale.
- Le suivi des mineurs enregistrés
Le mineur est astreint aux mesures de sûreté prévues par le CPP (Art. 632-5 CJPM).
→ Le régime de justification semestrielle (Art. 706-53-5, al. 5 CPP) n’est applicable qu'aux mineurs âgés d'au moins treize ans et condamnés pour un crime puni d'au moins vingt ans de réclusion.
7.3 Jurisprudences
- Conseil constitutionnel n°2021-936 QPC du 7 octobre 2021 : (Mesures de sûreté à l'encontre des personnes inscrites au F.I.J.A.I.T).
Le Conseil constitutionnel est saisi de l'article 706-25-7, al. 3 CPP dans sa rédaction résultant de la loi du 3 juin 2016. Cette disposition oblige l'intéressé, pour une durée de 10 ans (majeur) et 5 ans (mineur), à déclarer tout déplacement à l'étranger quinze jours au plus tard avant ce dernier.
Le Conseil constitutionnel énonce que la réalisation a poursuivi l'objectif de lutte contre le terrorisme, qui participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public (§10). De plus, l'inscription se limite à des cas spécifiquement prévus par la loi, et la décision ne peut être prise que par le magistrat compétent, qui tient compte de la situation personnelle des transmettant et, en particulier, de leur risque de récidive (§11). Ensuite, l'obligation de déclaration ne limite pas en soi le droit de se déplacer (§12). Enfin, il existe des mesures permettant à l'intéressé de faire lever la mesure. En effet, l'article 706-25-12 permet de demander l'effacement « si, compte tenu de la finalité du fichier, leur conservation n'apparaît plus nécessaire au regard de la nature de l'infraction, de l'âge de la personne lors de sa commission, du temps gagné depuis lors et de la personnalité actuelle de l'intéressé. » En cas de refus, des recours sont possibles (§13). Dès lors, l’article 706-25-7, al. 3 CPP est conforme à la Constitution.
8. La conformité à la Constitution du placement en détention provisoire des mineurs de 13 à 16 ans en matière correctionnelle
Conseil constitutionnel, Décision n°2002-461 DC, 29 août 2002.
Juridiction : Conseil constitutionnel
Nom : Décision n°2002-461 DC
Date : 29 août 2002
Portée géographique : portée nationale
Thèmes : La conformité à la Constitution de la Loi d’orientation et de programmation pour la justice
Résumé de l’affaire : La Loi d’orientation et de programmation pour la Justice datant de septembre 2002 prévoyait, en ces articles 17 et 18, de nouveau la possibilité de placer en détention les mineurs âgés de 13 à 16 ans en matière correctionnelle.
Problème de droit : La détention provisoire des mineurs âgés de 13 à 16 ans en matière correctionnelle est-elle conforme à la constitution, et sous quelles conditions ?
Portée / conclusion : Il est rappelé que le législateur peut « modifier ou abroger les dispositions antérieures sous réserve de ne pas priver de garanties des exigences de valeur constitutionnelle ; que les dispositions antérieures à la loi déférée prévoyaient déjà en matière criminelle la possibilité de placer en détention provisoire les mineurs de treize à seize ans ». Ainsi, en rétablissant à l’égard de ces mineurs « une possibilité de détention provisoire en matière correctionnelle s'ils méconnaissent les obligations du contrôle judiciaire, les dispositions critiquées n'ont privé de garantie aucune exigence de valeur constitutionnelle, compte tenu des conditions de procédure et de fond auxquelles reste subordonnée la détention provisoire » (Cons. 42).
En effet, la détention provisoire d’un mineur n’est possible que lorsque la mesure est indispensable ou qu’il est impossible d’en prendre une autre. Les règles posées à l’article 144 et 145 du Code de procédure pénale doivent être respectées. La détention doit être effectuée dans un établissement spécialisé ou dans un établissement qui sépare mineurs et majeurs, et en présence d’éducateurs. Enfin, la durée de la détention provisoire est limitée à quinze jours ou un mois renouvelable une fois* (Cons. 43). Les articles 17 et 18 de la Loi d’orientation et de programmation pour la Justice de 2002, instituant la possibilité de détenir provisoirement des mineurs de moins de 16 ans, sont conformes à la Constitution.
(*La décision ayant été rendue avant la réforme du CJPM, la durée de la détention provisoire indiquée est obsolète.)
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